Comment les visages pâles vont retrouver les Gire

Plus petit, j’ai reçu en cadeau d’anniversaire un livre de la Bibliothèque Rouge et Or qui s’appelait «les Mahuzier en Amazonie» . C’était vraiment effrayant tout ce qui leur arrivait. Pas un jour sans catastrophe naturelle, agression de bêtes aussi sauvages que féroces, pannes de moteur répétées, pertes et retrouvailles d’enfant, rencontres rocambolesques avec des personnages tout ripolinés. Ca faisait frémir mais tous ceux qui lisaient le bouquin avaient envie de faire partie de la famille Mahuzier. Bref, épatant.
Voulant vivre au moins un de nos rêves d’enfant, Agnès et moi avons donc proposé aux Gire de les rejoindre à bord du Lazy Jack dans leur odyssée amazonienne.
Vol de nuit jusqu’à Sao Paulo, longue escale matinale et envol pour Belem. Première tentative d’atterrissage sur une piste qui , à l’approche, ressemblait à s’y méprendre au grand bassin de la piscine municipale sans les baigneurs. Raté. Deuxième atterrissage pas mieux et voilà le commandant qui nous menace d’atterrir à Sao Luis , six heures de bus de Belem sans les arrêts et les changements de pneus. Et espoir d’attraper le bateau-navette pour Curalinho (escale inconnu du monde entier sauf des Gire qui devaient nous y chercher le lendemain matin en bateau -taxi pour nous ramener à Sao Sebastian de Boa Vista , pas mieux connue du Vieux Campeur mais où Lazy Jack avait élu mouillage), espoir disais-je en cours d’envol.
Le troisième atterrissage fut le bon et c’est les pieds dans l’eau que nous prîmes le taxi pour le Porto Bom Jesus où nous embarquâmes dans le bateau du même nom, direction donc Curalinho. Arrivée à une heure de chrétien déboussolé, dans la nuit, sous un crachin de pardon breton. Sur l’estacade, un chien nous accueillit chaleureusement, accompagné de trois pélerins embarquant à leur tour, pour le cœur des ténèbres probablement. Vous n’allez pas le croire mais il y avait un hostal ouvert à Curalinho et pour 15 Euros incluant petit déjeuner, nous avons pu abattre en vol ou au mur pas moins de 20 moustiques.
Bref, quoiqu’il en soit à 8h du matin, les Gire, tels des personnages homériques apparaissaient sur la même estacade pour nous mener vers de vraies aventures.
Sao Sebastian de Boa Vista, c’est la Venise du Para. Mais attention, elle mérite son surnom. Pas comme Goudargues , Venise du Gard ou Chateaulin , Venise de l’Ouest. Des rios, des maisons sur pilotis, des bateaux , des enfants dans l’eau, dans les arbres, des chantiers navals liliputiens, une usine à cœur de palmier.

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Nous faisons petit à petit connaissance avec les personnages de la flottille menée par l’African Queen qu’on appelle aussi la Sirène du Missisipi.
La Perle des Iles et ses 18 printemps trouvée à Belem par Jack Nicholson version tropicale n’ayant manifestement rien perdu de son magnétisme.
Comme il y a eu les mutinés du Bounty et les contrebandiers de Monfleet , nous rencontrons les foudroyés de Belem , et nos autres nouveaux amis : le très jovial Mike, la très distinguée Lisa, le circumnavigateur d’Amiens Marco et tous les autres.
En abordant Araras, notre escale suivante, au moment où le soleil presque couchant sublîme le fleuve et la forêt, l’ensemble de la flottille est pris d’une sourde angoisse. Serait-ce les bruits inquiétants venu d’outre les rives, l’inquiétude de mouillages mal connus, la crainte de voir les jacinthes d’eau nous prendre dans leurs rêts? Non! Les appels angoissés se multiplient et se propagent sur la VHF. C’est un cri lancinant, incantatoire, comme le cri noir des perroquets sur la berge. Les gorges sont sèches et le timbre des voix est tremblant: « pourra-t’on trouver des caïpi à terre ? »
Il n’y a rien à terre . Et nous assistons alors Agnès et moi, à la plus grande transgression que nous ayons connu sur un bateau. Pire qu’une histoire de cousin de lièvre….Philippe sort la bouteille de cachaça qu’il cachait dans la soute, comme je cachais « Lui » dans les toilettes de ma grand-mère. Des décennies d’interdit se trouvent confondues et il faut maintenant maîtriser Philippe qui ne veut mettre ni sucre ni citron vert avec le nectar.
Avec la force de conviction de Françoise, la souveraine éclairée du bord, Philippe nous fera la (les?) meilleure Caïpirinha du monde, distillée à la paille plutôt que sirotée.

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Une réponse à Comment les visages pâles vont retrouver les Gire

  1. TUAL dit :

    Coucou à vous,
    nous avons beaucoup apprécié le superbe montage de votre transat!!! bravo!!!
    nous sommes arrivés à Salvador de Bahia samedi soir après 12 jours et 11 h de navigation et cette transat a été magnifiquement vécue! heureux de l’avoir fait. Moins de chance que vous pour la pêche!
    Nous allons gentiment suivre un peu le même itinéraire que vous.
    On vous souhaite encore plein de bons moments sur mer ou sur terre.
    Bises amicales

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